C’est désormais chose faite. Après plusieurs jours de discussions, la question de la candidature indépendante n’est certes pas tranchée mais au nom de l’opposition, les trois anciens Ministres ont décidé de reprendre la marche en Guinée.

Pour protester contre la décision de la commission électorale nationale indépendante d’organiser la présidentielle avant les législatives.
Dans une déclaration commune, les trois anciens Premiers Ministres estiment que le président Alpha Condé a perdu toute légitimité. Lisez plutôt.

Dans sa déclaration du 6 mars 2015, l’opposition républicaine avait mis en garde les autorités gouvernementales et la CENI contre l’organisation de l’élection présidentielle avant les élections communales et communautaires. Car, ceci serait contraire aux dispositions de la loi et de l’accord politique du 03 juillet. Exécutant à la lettre les instructions du Président de la République, la CENI a rendu public, le 10 mars, la décision d’organiser l’élection présidentielle le 11 octobre 2015 et les élections communales à la fin du premier trimestre 2016.

A partir de là, l’opposition républicaine a décidé de mettre en application les décisions qu’elle avait annoncées dans sa déclaration du 06 mars 2015 :

 

    la suspension de la participation des députés de l’opposition aux activités de l’Assemblée Nationale

    La non-reconnaissance de la CENI
    la contestation ouverte des délégations spéciales et autres chefs de quartier illégalement installés par le pouvoir
    la reprise des manifestations citoyennes pour exiger la satisfaction des revendications légitimes de l’opposition républicaine.

Les leaders Cellou Dalein Diallo, Sidya Touré et Lansana Kouyaté se sont retrouvés à Paris pour examiner la situation. Ils étaient accompagnés à cette rencontre par BAH Oury, Baïdy ARIBOT et Hadja Tété NABE.

A l’issue d’entretiens fructueux, conviviales et responsables, les leaders ont fait les constats suivants :

    La gouvernance d’Alpha CONDE s’est illustrée depuis son installation comme Chef de l’État guinéen par un mépris total de l’autorité de la loi et une violation systématique des dispositifs de la Constitution fondant les principes de l’État de droit. La déclaration de ses biens et patrimoines (cf. article 36), la démission officielle de son poste de Président du RPG (article 38), la délivrance du message annuel de l’état de la nation (article 50), l’installation de la Haute Cour de Justice (articles 117 à 120) et les mises en place de la Cour Constitutionnelle et de la Cour des Comptes (article 160) ne sont pas effectives tout au long du mandat présidentiel.
    Les violations répétées du code électoral et le refus d’organiser, selon les dates et les périodes les scrutins à tous les niveaux tel que fixé par la Constitution ont abouti à une défiance totale de la population vis-à-vis des consultations électives. C’est ainsi que les législatives qui auraient dû intervenir dans le premier semestre 2011 n’ont eu lieu que le 28 septembre 2013, à la suite de plusieurs manifestations pacifiques qui ont été sauvagement réprimées avec plus d’une soixantaine de personnes tuées, des centaines d’handicapées à vie, des milliers de citoyens incarcérés dans des prisons et de plusieurs milliards de francs guinéens de destruction de biens et de marchandises. C’est dans le même mépris des lois que les délégations spéciales communales ont été installées en 2011 et subsistent jusqu’à présent, alors que leur durée de vie ne devait pas excéder 6 mois. La politique de la décentralisation, qui était un modèle en son genre, a été ainsi anéantie. Ces attitudes politiciennes méconnaissent également l’article2 point 2 du protocole de la CEDEAO sur la Démocratie et la Bonne gouvernance, signée et ratifiée par la Guinée, qui stipule «  les élections à tous les niveaux doivent avoir lieu aux dates et périodes fixées par la constitution et les lois électorales ».
    L’État guinéen est à ce jour en butte à plusieurs contentieux juridiques devant des juridictions internationales du fait des violations de l’article 13 relatif au code foncier et domanial, notamment en ce qui concerne la protection du droit de la propriété foncière et la procédure d’expropriation pour cause d’utilité publique. Cette gestion patrimoniale des biens publics a découragé les investisseurs nationaux et étrangers, causant ainsi un grave tort au développement du secteur privé dans le pays.
    Le Chef de l’État guinéen M. Alpha CONDE a commis une grave forfaiture en modifiant, en violation des dispositions de la Constitution et du principe de la séparation des pouvoirs, la loi organique portant composition, organisation et fonctionnement de l’Institution Nationale Indépendante des Droits Humains (INIDH). Au regard de la loi, ceci constitue un acte de haute trahison.
    Les violations récurrentes des droits de l’homme sur l’ensemble du territoire avec les assassinats de manifestants pacifiques et les tueries massives en Guinée-Forestière ont créé un climat d’insécurité généralisé. Des cadres de l’administration, de la société civile et des responsables politiques sont lâchement assassinés sans qu’aucune lumière ne soit faite sur ces crimes. Tous les responsables de ces crimes bénéficient d’une impunité totale.
    La propagation et la persistance de la fièvre hémorragique Ebola dans la sous région avec plus de dix mille morts enregistrés par l’OMS sont imputables dans une large mesure à la mauvaise gestion par le gouvernement guinéen de la maladie dès son apparition. C’est le lieu de rendre hommage à la communauté internationale pour son aide précieuse et déterminante dans le succès de la riposte contre la maladie.
    Le bilan d’Alpha CONDE est marqué par l’aggravation de la pauvreté et du chômage dans le pays avec des pertes nettes d’emplois et une crise économique et sociale sans précédent.

Au vu de toutes ces dérives:

    M. Alpha CONDE perd toute légitimité pour présider encore aux destinées de la Guinée. Son maintien au pouvoir constituerait une grave menace pour la paix et l’unité de la Guinée et la stabilité de la sous-région.
Au regard de tout ce qui précède, les leaders ont décidé:

    D’appliquer les mesures envisagées dans la déclaration du 06 mars 2015 telle que rappelées au deuxième paragraphe de la présente déclaration.

    De renforcer l’unité et la cohésion de l’opposition qui va s’atteler dès maintenant à l’élaboration d’un programme commun de gouvernement

    De rentrer immédiatement en Guinée pour mener avec les autres partis politiques et toutes les forces vives du pays la lutte pour le respect de la Constitution, des lois de la République et des accords.

 

Paris le 23 mars 2015

Ont signé

 

Pour l’UFDG

 
    

Pour l’UFR
    

Pour le PEDN

 
    

 
    

Cellou Dalein Diallo
    

Sidya Touré
    

Lansana Kouyaté