Dans une interview accordée au reporter de Guineelive.com, le président de l’institution nationale des droits de l’homme s’est exprimé sur des sujets qui alimentent ces derniers temps l’actualité guinéenne. Dans cet entretien, nous avons parlé de l’extradition de Toumba Diakité à Conakry, le phénomène de sxtape et l’adoption de la loi électorale à l’Assemblée nationale.
Lisez…
Guineelive.com : S’il vous plait présentez-vous à nos lecteurs ?
Je suis Mamady Kaba, président de l’institution nationale des droits de l’homme(INDH).
Guineelive.com : Après l’adoption du code électoral à l’assemblée nationale le mois dernier, des acteurs de la société civile ont saisi l’INDH, afin de saisir la cour constitutionnelle dites-nous comment les choses se passent ?
Au mois de février 2016, nous avions fait une déclaration pour demander au Président de la République de recevoir le chef de file de l’opposition pour mettre en place un cadre de dialogue qui nous éviterait une crise profonde. Alors, c’est ce qui a été fait heureusement. Le Président de la République et le Chef de file de l’opposition ont discuté et ils ont mis en place un cadre de dialogue. Et, avec ce cadre de dialogue, il y’a eu un accord. Et certains participants aux négociations ont dénoncé cet accord dès sa signature jusqu’à ce qu’une session extraordinaire a permis l’assemblée nationale d’adopter la loi sur ce code électoral révisé. Et, les acteurs de la société civile, des partis politiques se sont insurgé et ils sont passés par nous pour saisir la cour constitutionnelle pour exiger que cette loi soit renvoyée au Parlement en seconde lecture, afin que leurs préoccupations soient prises en compte. Donc, nous les avions accompagnés, nous avions transmis leurs griefs à la cour constitutionnelle et aujourd’hui nous attendons l’arrêt de la cour constitutionnelle. Mais ce qui est important, c’est que pratiquement toutes les forces politiques, sociales opposées au code sont unanime sur le fait que ce code comporte des violations de droits de l’homme qui pourraient conduire à des crises. J’ai écouté beaucoup de personnes et j’ai même compris que la dimension ethnique s’invitait dans le débat. Alors, il n’est pas bien dans notre pays avec l’état actuel des choses, nous sommes une jeune démocratie, nous avions plus besoin de consensus, alors laissé une crise s’installé dans le pays de cette façon quand, c’est une mauvaise chose pour notre pays. Et, il est mieux de prévenir que de guérir. Au lieu que nous attendons que la crise s’installe pour nous mettre en encore à chercher des solutions, il faut tout faire pour éviter qu’une crise de cette nature s’installe, nous n’en n’avions pas besoin. Et, puis que nous sommes capables d’éviter la crise par des réactions institutionnelles, alors c’est ce que nous tentons de faire pour que nous ayons une loi autour de laquelle il y’a un consensus qui ferait que dans l’application de la loi il n’y ait pas une Guinée contre une autre, mais toute une Guinée derrière la loi, engagée dans l’application de la loi, et ainsi nous atteindrons les résultats que nous recherchons à travers la loi. Mais dans le cas contraire, nous aurons exactement le contraire de ce que nous recherchons, à savoir l’absence de la paix et de la stabilité.
L’actualité guinéenne est dominée par le phénomène de la sextape. Beaucoup de grandes personnalités sont accusées. En tant que président de l’institution nationale des droits de l’homme. Quel est votre avis ?
C’est vrai que la vie est devenue chers, mais je pense que l’Etat guinéen a besoin de renforcer les reformes qui sont en cours. Vous savez, il faut reconnaitre aussi que dans un passé récent que les guinéens ne vivaient plus de leurs revenus. La drogue, les faux billets, les détournements, et tous les restes, faisaient que les guinéens n’avaient même pas besoin de leurs salaires. Et, ils avaient d’autres moyens de vivre qui n’avaient rien avoir avec leurs salaires. Et, maintenant que le nouveau régime d’Alpha Condé a décidé à ce que tous les guinéens vivent de leurs revenus, les gens se sont rendu compte très rapidement que leurs revenus ne pouvaient pas leur permettent de vivre et de soutenir leurs familles. C’est parce que les autres sources illicites de revenus qui étaient bouchées pour beaucoup de guinéens que maintenant les gens apprennent à compter sur leurs revenus qui ne suffit plus pour leur faire vivre. Donc, il est important que les mesures d’accompagnements soient mises en place qui vont compléter leurs revenus et aidé les travailleurs à vivre de leurs salaires.
Bien sûr qu’il y a un principe qui dit nul n’est censé ignoré la loi. Mais courant l’année 2016, nous avons fait un reportage sur les lois de la république. La majorité des guinéens rencontré à Conakry ignorent ou ne maitrisent pas les textes fondamentaux de la république (la constitution, code civil, code pénal et autres). Qu’est-ce l’INDH fait pour inverser cette tendance ?
Nous avions déjà commencé. Nous avions traduit des extraits de notre constitution dans les langues nationales et nous avons vulgarisé certains textes et à travers ces textes, nous avions compris que les populations guinéennes sont assoiffées de connaissance, elles veulent connaitre mais elles n’ont pas l’opportunité d’accéder. Donc, nous pensons qu’il est important que la Guinée fasse beaucoup d’efforts dans la vulgarisation de nos lois, permette à nos populations de comprendre nos lois dans les langues qu’elles comprennent. Quand vous prenez le Sénégal, les lois sont en français et en wolof c’est ce qui permet aux paysans de comprendre les lois qui sont votées, leurs impacts etc…Mais, chez nous tel n’est pas le cas, tout est en français et moins de 50% de notre population comprend le français. Donc, il est important que la Guinée travaille pour faire en sorte que les lois soient accessibles aux populations à la base qui faciliteraient leurs applications par les autorités compétentes.
Touba Diakité a été extradé à Conakry hier dimanche, quel est votre sentiment ?
C’est un sentiment de satisfaction d’abord parce que, c’est un grand pas dans la résolution des problèmes de 28 septembre. Mais d’autre part, je suis très inquiet pour sa sécurité, et lui-même est très inquiet pour sa sécurité, il l’a exprimé à plusieurs fois à Dakar et nous partageons cette inquiétude vu tout ce qui s’est passé. Nous savons qu’il y’a beaucoup de personnes et pas de moindre des civiles et militaires qui veulent sa tête pour venger des actes qui lui sont attribués. Donc, puis que Toumba qui a quitté Conakry à travers des actes qu’il a posé a fait beaucoup de mécontents et qui sont prêts à la moindre occasion de se venger de lui. Donc, il est important que des mesures drastiques soient prises pour assurer sa sécurité et aussi la sécurité physique de sa personne, mais il y’a aussi la sécurité de son environnement. Il faut que ses conditions de détentions soient les meilleurs possibles, et veiller à sa santé. Parce que dans ce cas de figure, l’Etat est responsable à tout point de vue de sa sécurité. L’Etat peut ne rien faire qu’il ne soit mort, mais si l’Etat ne fait pas ce qui est à son pouvoir, s’il meurt, il sera toujours tenu pour responsable de sa mort. C’est pourquoi il ne faut pas du tout prendre cette situation à la légère. Il faut tout mettre en œuvre pour que sa sécurité soit assurée et qu’il puisse témoigner librement et dans les bonnes conditions pour aider la justice guinéenne à voir claire dans le dossier du 28 septembre.
Selon vous est-ce que la Guinée dispose des moyens pour la tenue de ce procès dans les bonnes conditions ?
Moi, je me suis largement exprimé là-dessus, je souhaite que la Guinée puisse organiser ce procès si nous même nous pouvons faire quelque chose pour favoriser cela, nous n’hésiterons pas à le faire. C’est d’ailleurs une obligation légale pour nous et nous souhaitons que la Guinée réussisse à relever ce défi majeur qui dépasse de loin les capacités ordinaires de notre pays.
Pouvez-vous nous dressez-les actions que compte entreprendre l’INDH courant l’année 2017 ?
Au cours de l’année 2017, nous avons un plan d’action que nous allons mettre en œuvre si les moyens le permettent. En cours terme nous envisageons de mettre en place une commission qui va faire la lumière sur les derniers évènements et ensuite nous envisageons de mettre en place un système de contrôle permanant de nos lieux de détentions, nous voulons contribuer à la formation aux droits humains de nos forces de défense et de sécurité, nous voulons sensibiliser les populations sur les droits et devoirs avec des écoles, des mouvements de jeunes, des femmes et dans les sièges des partis politiques. Et, nous voulons faire passer un message selon lequel les populations n’ont pas le droit de se rendre justice elles, notamment par le lynchage. Aussi, nous comptons mettre en place nos démembrements dans les régions et dans les préfectures. Nous entendons mettre en place à Conakry des bureaux dans chaque commune pour assurer l’assistance juridique et judicaire des victimes et aider ainsi les populations à accéder à la justice et aider aussi la justice à donner satisfaction aux populations. Nous allons rapprocher d’avantages les justiciables, des institutions judicaires pour que les efforts fournis par les institutions judicaires soient véritablement profitables aux justiciables et reconnus comme tels.
Entretien réalisé par Daouda Yansané
664 44 23 43