El hadj Momo Bangoura s’adresse aux jeunes de Guinée et à Alpha Condé
J’ai eu l’avantage d’écouter le Président de la République, Professeur Alpha Condé à l’occasion de sa rencontre avec les étudiants guinéens venus lui présenter leur excuse le samedi 15 juillet 2017. Dans une longue et brillante intervention, le Président invite tous les guinéens à enseigner à la jeunesse guinéenne l’histoire de sa patrie ; la nation guinéenne.
Répondant à cette invitation, j’estime qu’il est pour moi, en tant que l’uns des doyens qui ont participé à la lutte de libération de la Guinée, nécessaire, voire impérieux de continuer cette noble tâche d’enseignement au bénéfice de la vaillante jeunesse guinéenne.
Je commencerai par dire aux jeunes que la décision du partage de l’Afrique par les puissances européennes a été prise à Berlin en Allemagne en 1885. Quant à la création de l’AOF ( Afrique occidentale française) le décret a été publié le 16 juin 1895 avec comme capitale Saint Louis du Sénégal. Le transfert de la capitale a eu lieu en 1902 à Dakar.
Le décret créant la Guinée Française a lieu le 10 mars 1893 avant même la guerre d’occupation. Depuis cette date jusqu’au 02 octobre 1958, date de la proclamation de son l’indépendance, la Guinée a été gérée par plus d’une vingtaine de gouverneurs dont Roland Pré cité par le Président dans son discours du 15 juillet 2017. Je voudrais informer le Président Alpha Condé que le gouverneur Roland Pré a géré la Guinée française de 1948 à 1951. C’est lui qui avait emprisonné Sékou Touré en 1950 pour un fait de grève.
Ce que beaucoup de guinéens ne maitrisent pas, la deuxième guerre mondiale de 1939-1945 a été l’une des causes principales du réveil des peuples colonisés. Des colonies françaises de l’Afrique, nous sommes arrivés à l’union française sous la quatrième République. C’est de là que sont nés le syndicalisme et les partis politiques dans les territoires africains. Le RDA (Rassemblement Démocratique Africain) est créé en octobre 1946 à Bamako. La section guinéenne du RDA a vu le jour le 14 mai 1947. Ce qui a d’avantage embarrassé le gouvernement français, c’est la prise d’arme des peuples Vietnamiens et particulièrement des Algériens pour leur souveraineté. Voilà la cause de l’adoption de la loi cadre Gaston Defferre le 23 juin 1956. A partir de cette date, les conseillers territoriaux ont été élus le 31 mars 1957.
Parmi les partis politiques existants en Guinée, c’est le PDG ayant à sa tête Ahmed Sékou Touré qui a obtenu 57 conseillers sur 60. Conformément à la loi cadre du 23 juin 1956, le gouvernement de la Guinée française d’alors constitué, Jean Romadier en était le président et Ahmed Sékou Touré leader du parti majoritaire vice-président. Mais dans les faits, c’est Ahmed Sékou Touré qui était l’acteur principal du gouvernement. La preuve irréfutable de ce argument est l’acte de la suppression de la chefferie de canton le 31 décembre 1957. Tous les guinéens savaient que le point d’appui du régime colonial en Afrique, en Guinée en particulier, était les chefs des cantons, système institué en 1921 après l’élimination des résistants. La guerre d’Algérie s’accentuant voilà que le Général De Gaule revient au pouvoir en sa qualité de Premier ministre. Dès après son investiture le 1er juin 1958, le voilà lancé la campagne référendaire pour la conquête de deux objectifs qui sont les suivants :
Restaurer l’autorité de la République
Créer la communauté Franco-Africaine
Ce qui convient de souligner, c’est le souci de démocratisation du nouveau régime qui animait le PDG.
La chefferie de canton supprimée, les communes rurales ont été installées ainsi que les conseils de villages. Toutes ces collectivités étaient gérées par des responsables démocratiquement élus. Deux congrès du parti étaient consacrés à cela. Il s’agit des 3ème et 4ème congrès. C’est pour dire qu’aucun autre parti, aucun autre mouvement n’avait d’assises en Guinée en dehors du PDG-RDA. Le Professeur Alpha Condé et la FEANF (Fédération des étudiants africains en France) étaient à Paris. Ils avaient certainement le désir de voter « NON » le 28 septembre 1958. Ils avaient des alliés partout en Afrique. Mais en Guinée, c’est le PDG-RDA qui a pris la décision suprême de voter « NON » le 28 septembre 1958. Aucun autre territoire ne l’avait fait, cependant la FEANF existait partout.
Historiquement il est évident que la guerre d’indépendance nous a été déclarée par la France. Les écrits abondant des décideurs français le prouvent éloquemment sans compter le célèbre communiqué Franco-Guinéen publié le 14 juillet 1975 sous l’égide des Nations Unies. C’est dans ce communiqué que le gouvernement français a reconnu et regretté les faits. On se souviendra de la visite officielle du Président Valery Giscard d’Estaing en Guinée en décembre 1978, et celle d’Ahmed Sékou Touré en France en septembre 1982.
Je félicite le Président Alpha Condé pour avoir pris la décision de réaffirmer ce que Ahmed Sékou Touré ne cessait de dire à savoir la défense de notre souveraineté, la responsabilisation de la jeunesse et la totale émancipation de la femme guinéenne. Ahmed Sékou Touré avait accompli sa mission avant son rappel à Dieu. A titre d’exemples, ce sont les jeunes guinéens qui avaient honorable tâche de gérer la Panafricaine de la jeunesse de sa création en 1965 jusqu’en 1985. Kanfory Bangoura, Idrissa Traoré, Sékou Cissoko et Oumar Diarso le savent mieux que moi. Quant aux femmes, Jeanne Martin Cissé ne sera oubliée ni par l’Afrique avec la Panafricaine des femme, ni par le monde entier pour avoir été la seule femme à présider le conseil de sécurité.
Jeunes de Guinée, pour répondre à l’appel du Président Alpha Condé, j’ai cru devoir vous fournir ces faits relatifs à l’histoire récente de notre chère et glorieuse République de Guinée. Je suis à votre disposition pour toute fin utile.

El hadj Momo Bangoura, président d’honneur du PDG RDA