La conférence de presse tant annoncée du désormais ex-président de la Cour constitutionnelle, M. Kèlèfa Sall, a finalement eu lieu quelques heures avant le Décret de confirmation de son successeur désigné par ses pairs, M. Mohamed Lamine Bangoura, à la tête de l’institution.
A écouter M. Kèlèfa Sall, face à la presse, on se rend compte que la quasi-totalité des accusations portées contre lui sont avérées. A plusieurs reprises, M. Kèlèfa Sall a tenté de se cacher derrière la liberté d’opinion exercée en sa qualité de président de cette Cour.
Malgré le soutien de l’opposition politique et de la société civile guinéenne, la crise que traverse la Cour constitutionnelle, depuis deux ans, a fini par déraciner ‘‘le baobab’’ de la plus haute juridiction du pays.
La démarche des huit autres conseillers de la Cour, sans cesse dénoncée, n’a pas empêché la procédure d’aboutir ; seul moyen trouvée, parce qu’aucune Loi ne prévoit une procédure de destitution du président de la Cour constitutionnelle. Forts de ce vide juridique, les membres de la Cour constitutionnelle ont utilisé une Motion de défiance. Et, le 28 septembre dernier, ils ont décidé élire un nouveau président, suivi du vice-président de la Cour.
Malgré le soutien du barreau de Guinée, ainsi que de certains juristes et constitutionnalistes, M. Kèlèfa Sall n’a pas reçu le plus attendu ; celui de l’Association des magistrats, dont il est issue.
Saisi par la Cour constitutionnelle, suite à l’Arrêt de la plénière du 28 septembre 2018, le Chef de l’Etat a été appelé à intervenir. Dans sa démarche, en cette période de crise au sein de l’institution, le Président de la République a reçu les autres présidents des institutions républicaines du pays pour évoquer cette crise. C’était le dimanche dernier, 30 septembre. Comme pour dire que le Décret de confirmation de l’Arrêt de la Cour, désignant désormais M. Mohamed Lamine Bangoura, président de l’institution, n’a pas été unilatéralement pris.
A rappeler que depuis le début de cette crise, les opposants au régime Condé ne cessent d’accuser le Président de la République d’en vouloir à M. Kèlèfa Sall parce qu’opposé à une éventuelle réforme constitutionnelle lui permettant de briguer un nouveau mandat présidentiel, au-delà de 2020.
Pourtant, selon les informations publiées ces derniers jours, le fameux discours de M. Kèlèfa Sall à l’investiture du Président Alpha Condé, en 2015, est plutôt l’œuvre des autres membres de la Cour. Son projet de discours présenté à ses collègues encensait plutôt le Président Alpha Condé. Malheureusement, l’opinion le perçoit comme victime de sa position affichée contre une éventuelle réforme constitutionnelle, alors qu’il n’a été que le porte-voix de ses collègues.
Les conseillers constitutionnels, sans l’avoir dit, doivent reprocher à leur ancien président de n’avoir jamais assumé la collégialité de ce discours, sans oublier sa gestion ‘‘opaque’’ des affaires.
Ce qui d’écorche encore un peu plus la probité morale de M. Kèlèfa Sall, c’est ce précédent avec le trésor français, au quel il devait 70 milles euros de frais de soins impayés, alors qu’il était membre du Conseil national de transition (CNT). Précédent ayant pour conséquence, l’empêchement des membres de la Cour constitutionnelle de Guinée d’avoir un visa long séjour.
Au vue de toutes ces informations publiées dans la presse, on se rend compte que le problème de M. Kèlèfa Sall est ailleurs ; la crise à la Cour constitutionnelle est interne.
On a également appris que par deux fois, le Président Alpha Condé a exhorté les membres de la Cour à ne pas destituer M. Kèlèfa Sall.
Malheureusement, Alpha Condé n’a pu rien faire cette fois-ci, parce que les membres de la Cour, ‘‘excédés par leur président’’, ont pris tout le monde de court, le 12 septembre dernier, avec une Motion de défiance à son encontre.
L’opposition politique qui cherche la moindre chose pour croiser le fer avec le régime refuse de voir ces réalités, arguant toujours qu’il s’agisse de la main du Président Alpha Condé derrière cette affaire.
En tout cas, le plus important désormais est que l’opinion publique a compris qu’il s’agisse d’agissement à l’encontre du Président Alpha Condé, et que le problème à la Cour constitutionnelle est interne quoi qu’on veuille croire.

Par Mohamed Sangaré

Economiste, Observateur de la vie sociopolitique guinéenne