Face à la lenteur dans les procédures judiciaires de la Cour de Répression des Infractions Economiques et Financières, les débats font rase en Guinée. Au point que chacun va de ses commentaires. C’est le cas des acteurs qui sont chargés d’éplucher les dossiers.

Pour l’un des avocats des accusés, l’ancien Bâtonnier de l’ordre des avocats,  l’on a mis les charrues avant les bœufs.

Guineelive vous propose les explications de Me Mohamed Traoré :  « En réalité, on a mis tout simplement la charrue avant les bœufs. Pour que la CRIEF puisse traiter de manière idoine les dossiers de sa compétence, il devait y avoir au préalable un travail minutieux et sérieux effectué par des techniciens ou experts afin de réunir des éléments concrets sur lesquels le procureur aurait pu se baser pour engager des poursuites. En matière d’enrichissement illicite par exemple, la procédure aurait voulu qu’il y ait un inventaire des biens des personnes mises en cause, l’évaluation de ces biens, leur mise en rapport avec les revenus licites de ces personnes. En cas d’écart entre leur patrimoine et les revenus réels et licites des mis en cause, ceux-ci sont mis en demeure de le justifier dans un certain délai. Les procédures relatives au blanchiment de capitaux sont si complexes qu’on ne peut les traiter dans la précipitation. Elles exigent des enquêtes approfondies et très techniques. On a l’impression parfois que relativement à la mise en place de la CRIEF, des personnes étaient déjà ciblées ou dans le viseur et qu’il fallait rapidement créer un instrument pour pouvoir les neutraliser. Cela ne veut pas dire bien entendu qu’il n’y a rien à leur reprocher, bien qu’elles soient présumées innocentes. Ce sont donc les conséquences de la précipitation qui se traduisent aujourd’hui par les difficultés de la CRIEF à gérer  les dossiers relevant de sa compétence.

On n’arrête pas les gens pour chercher ensuite les preuves des faits qu’on leur reproche. C’est le contraire. Et maintenant que cette maladresse a été commise, ce n’est pas une augmentation des délais de procédure qui pourrait la réparer. »

Seulement  voilà, face à cette sortie du Bâtonnier,  le Procureur spécial près la CRIEF, Aly Touré ne   voit pas les choses de la même façon. Pour lui, les problèmes sont ailleurs : « les difficultés sont d’ordre procédural. Parce qu’au  niveau  de  la  CRIEF spécifiquement, nous faisons de l’enquête financière, qui va être collé difficilement aux délais légaux qui sont dans le code de procédure pénale. C’est pourquoi nous plaidons, à ce qu’il y ait une rallonge de délai au niveau du code de procédure; ne serait-ce qu’une refonte dans ce cadre-là. »

D’où cette question  à propos de la CRIEF,  qui de Me Mohamed Traoré ou Aly Touré dit la Loi ?

 

Mohamed SOUMAH