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Problématique de la gestion des Déchets à Conakry : Un expert apporte des pistes de solutions

La ville de Conakry est l’une des capitales africaines les plus sales. Je tiens à rappeler que la notion d’ordures et de déchets est à relativiser, car les déchets sont des ressources dites  »méconnues » pour des pays qui ne maîtrisent pas la technologie. Dans un passé récent, les métaux lourds qui jonchaient la ville de Conakry ont disparu, ils sont collectés et vendus au détail pour un nouveau  recyclage vers la chine.L’insalubrité dans les villes ne saurait diminuer sans une politique d’assainissement qui tienne compte des plans  d’urbanisation et du développement des infrastructures. La production des ordures est liée au mode de consommation. Plus on a un revenu élevé, plus on produit des ordures conséquemment.

Conakry connait aujourd’hui un développement tentaculaire avec une urbanisation sauvage, sans respect de plan d’aménagement s’il y en a. Même si les services en charge de la salubrité installaient des dépotoirs dans chaque carrefour, cela ne resolverait pas la problématique de la gestion des ordures. A l’image de l’usine d’engrais mise en place par le gouvernement, il est aussi important de mettre en place des structures de recyclage avec une politique ambitieuse, car Conakry est devenu aujourd’hui une ville millionnaire avec une démographie galopante sans le développement des infrastructures sanitaires et d’assainissement.

L’assainissement de la ville de Conakry doit être tout un programme de mandature présidentielle accompagnée par des mesures courageuses et non pas par des actions de façade et populistes pour des fins inavouées.

La ville de Conakry ne doit pas se comparer à la ville de Kigali dans le cadre de l’assainissement.  A Kigali, la loi est claire et elle est respectée, tu déposes une ordure, tu es frappé d’une amende de 100 USD ou 6 mois de prison. Contrairement à la Guinée, c’est le législateur guinéen qui est le premier à violer la loi.

Loin d’encourager l’incivisme, il s’agit de constater comment les dirigeants à tous les niveaux gèrent leurs déchets ménagers /ordures ; ce sont les berges de la mer qui paient les frais, presque les 80% y habitent. Que dire du reste de la population ? Pour cette dernière, ce sont les espaces publics qui paient les frais ou les caniveaux. Aux dires de certains habitants de Conakry, je cite : « qu’il n’est pas possible de produire des ordures par le biais des consommations habituelles et les  déposer dans son salon ou vers un entourage immédiat ». Pour ces derniers, l’unique recours c’est la rue, les espaces publics ou les caniveaux, comme pour dire à l’Etat, vient ramasser les ordures, car tu ne crées aucune condition pour nous aider à nous débarrasser de celles-ci.  Cet incivisme n’est pas à encourager, mais il est occasionné et instrumentalisé par l’inexistence de politique adéquate de gestion des ordures.

L’on ne doit plus résumer la question de la gestion quotidienne des déchets dans la ville de Conakry par les actions de ramassage sporadique des ordures, il s’agit surtout de penser à la délocalisation de la décharge finale de la  Minière qui est aujourd’hui située en plein centre de Conakry, entouré d’établissements humains. Le processus d’évacuation à travers les calabraises  du Service Public de Transport des Déchets mises à la disposition des communes observe des difficultés dans ce processus de collecte et d’évacuation.

Conakry avec plus de 90 quartiers, il est souhaitable d’avoir au moins un camion par quartier qui doit être géré par les chefs de quartier dont l’essentiel des activités se résume à la délivrance des certificats de résidences et de complicité dans le bail des concessions à problème.

Pour assurer une gestion quotidienne des ordures, l’Etat à travers les services spécialisés doit :

  • Mettre les moyens financiers et techniques à la disposition des communes ;
  • Rendre responsable chaque Président de conseil de quartier de l’assainissement de sa localité en lui dotant de la logistique nécessaire ;
  • Suivre et évaluer les quartiers à travers l’organisation d’un prix du quartier le plus propre ;
  • Renforcer les capacités de gestion des responsables de quartier par des formations liées à la gestion des déchets ménagers ;
  • Donner une place de choix à l’assainissement dans les programmes et plans de développement communaux ;
  • Développer et promouvoir les PME et PMI de collecte des ordures ;
  • Créer un fonds national de salubrité publique dont l’accès est ouvert à tous les promoteurs à l’image des différents fonds d’appui qui sont crées à tout moment sans résultats concrets ;
  • Mettre en place des fabriques de récupération des déchets pour les compostes/ engrais organiques ;
  • Créer de nouvelles décharges finales loin de Conakry et des sites de transits des ordures par quartier ;
  • Conditionner l’élection des élus locaux par la présentation d’un programme concret d’assainissement des juridictions ;
  • Punir les inciviques à la hauteur de leur forfaiture à l’image d’autres pays.

En somme, sans la mise en place des structures de traitement et de recyclage des ordures, Conakry ne sera jamais propre, même si on distribuait  des poubelles dans chaque ménage. Il est aussi important de souligner que les responsables des quartiers ont un rôle crucial à jouer dans l’assainissement de leurs localités comme cela se passait pendant le premier régime.

DOUMBOUYA MAMADOU, SOCIOLOGUE DE L’ENVIRONNEMENT

5ème PROMOTION DE L’ERAIFT / UNESCO/UNIKIN

SPECIALISTE EN SAUVEGARDE ENVIRONNEMENTALE ET SOCIALE

E-mail : doumbouya.expert@gmail.com. Tel : 622 30 57 35