Le candidat de l’opposition ougandaise Bobi Wine, principal adversaire de l’inamovible Yoweri Museveni, a revendiqué vendredi la victoire lors de la présidentielle de la veille, dont les premiers résultats officiels donnent le président sortant en tête.

Lors d’une conférence de presse à Kampala, où les réseaux sociaux sont suspendus et où l’accès à internet est fortement perturbé, M. Wine a “rejeté” ces premiers résultats, dénonçant “une véritable mascarade” et affirmant avoir “largement vaincu” M. Museveni, qui brigue un sixième mandat.

“Je suis très confiant, nous avons largement vaincu le dictateur. (…) Nous avons certainement remporté l’élection et nous l’avons largement remportée”, a déclaré M. Wine, s’exprimant devant les journalistes dans le jardin de sa maison, à la périphérie de la capitale.

“M. Museveni essaie de faire croire qu’il est en tête. Quelle blague”, a poursuivi l’ancien chanteur de ragga. Selon lui, le scrutin a été entaché par “des illégalités venues d’en haut, que Museveni et son régime sanguinaire ont commises pour préparer le pire trucage jamais connu par le pays”.

Dès jeudi peu après minuit, M. Wine a dénoncé une première fois sur Twitter – et ce malgré la censure – “des fraudes répandues” et appelé la commission électorale à “annoncer la volonté du peuple”.

Cette dernière a répondu vendredi dans la matinée à ces affirmations, lui demandant de “démontrer au pays de quelle manière, de quelle façon les résultats sont truqués”.

Lors de sa conférence de presse, M. Wine a déclaré avoir reçu des milliers de rapports d’irrégularités, citant des bulletins préremplis, des électeurs influencés ou n’ayant reçu de bulletin que pour les législatives et pas pour la présidentielle, ou encore des urnes ouvertes et bourrées dans certains districts.

Il a promis que son équipe partagerait “toutes les irrégularités” lorsqu’internet serait rétabli.

– Museveni en tête –

Les 18 millions d’électeurs ougandais (sur une population totale de 44 millions) étaient appelés à départager M. Wine, devenu à 38 ans le principal candidat de l’opposition en surfant notamment sur sa popularité au sein de la jeunesse, et M. Museveni, au pouvoir depuis 1986.

Vendredi dans la matinée, l’intense trafic habituel s’est fortement réduit dans les rues de Kampala, où certains commerces sont fermés et où des soldats et des policiers patrouillent à pied, tandis que la commission électorale a commencé à publier les premiers résultats du vote.

Ils donnent M. Museveni en tête avec 63,92% des voix, contre 28,36% pour M. Wine. Patrick Amuriat, un autre candidat de l’opposition, cumule 3,55% des suffrages.

Aucun des huit autres candidats en lice ne dépasse pour le moment les 1%.

Ces résultats correspondent à 29,44% des bureaux de vote (soit quelque 10.212 sur un total de 34.600).

Jeudi soir, le président de la Commission électorale, Simon Byabakama, a estimé que ce scrutin présidentiel et législatif s’est “généralement déroulé dans le calme dans tout le pays”, ce qu’a aussi confirmé le porte-parole de la police, Fred Enanga.

Mais M. Wine a dénoncé des “violences”.

Un diplomate installé à Kampala a déclaré vendredi à l’AFP sous couvert de l’anonymat que des violences isolées avaient eu lieu, ainsi que de nombreuses irrégularités, mais qu’aucun signe de manipulation massive du vote n’avait été constaté.

Particulièrement violente, la campagne électorale a été émaillée d’émeutes et d’arrestations – notamment de M. Wine – et a été endeuillée par plusieurs dizaines de morts.

Les Etats-Unis, l’Union européenne, les Nations unies et des organisations de défense des droits ont exprimé leur inquiétude sur l’intégrité et la transparence de l’élection.

Une seule organisation étrangère, l’Union africaine, a envoyé des observateurs. Les Etats-Unis ont eux annulé l’envoi d’une mission d’observation, devant le refus des autorités ougandaises d’accueillir nombre de ses membres.

Les résultats de l’élection présidentielle sont attendus “d’ici samedi” après-midi.

AFP