Le président nigérien déchu a décidé de déposer une requête devant la justice ouest-africaine. Il dénonce son « arrestation arbitraire » et « la violation de sa liberté d’aller et venir ».

Le président nigérien Mohamed Bazoum, ici lors d’une rencontre avec António Guterres, secrétaire général de l’ONU, le 2 mai 2022 à Niamey. © Issouf SANOGO / AFP

 Le président nigérien déchu Mohamed Bazoum a décidé de saisir la justice ouest-africaine pour obtenir sa libération et le rétablissement de l’ordre constitutionnel dans son pays, près de deux mois après un coup d’État opéré par des militaires qui l’ont renversé et le séquestrent toujours.

« Nous demandons (…) au vu de la violation des droits politiques, que l’État du Niger soit condamné au rétablissement immédiat de l’ordre constitutionnel par la remise du pouvoir au président Bazoum qui doit continuer de l’exercer jusqu’à la fin de son mandat le 2 avril 2026 », a déclaré le 20 septembre à l’AFP son avocat sénégalais, Maître Seydou Diagne.

La requête déposée devant la Cour de justice de la Communauté économique des États d’Afrique de l’Ouest (Cedeao) le 18 septembre invoque « l’arrestation arbitraire » et « la violation de la liberté d’aller et venir » du président Mohamed Bazoum, de sa femme Haziza et de son fils Salem, détenus avec lui au palais présidentiel depuis le 26 juillet.

Motif d’espoir

Selon Maître Diagne, ses « clients sont victimes de graves et intolérables violations des droits de l’homme. Ils ont le droit de saisir les juridictions compétentes. Ca ne peut pas aggraver leur situation, c’est un motif d’espoir que justice leur soit rendue ». En cas de décision favorable, « l’État du Niger a(ura) l’obligation juridique d’exécuter la décision », a-t-il assuré.

 « Ce qui nous intéresse, c’est d’obtenir une condamnation de l’État du Niger par une décision de justice. Le combat de monsieur Bazoum est un combat par le droit », a-t-il souligné. Maître Seydou Diagne a également affirmé que « le général Tiani n’est pas habilité par la loi nigérienne pour procéder à des arrestations. Il a été nommé par décret depuis 2011 pour assurer la sécurité du président ».

La Cour de justice de l’organisation est la principale juridiction de la Cedeao, composée de 5 juges choisis parmi les ressortissants des États membres. Mi-août, les auteurs du coup d’État avaient de leur côté annoncé leur intention de « poursuivre » Mohamed Bazoum pour « haute trahison » et « atteinte à la sûreté » du pays. La Cedeao menace les auteurs du coup d’État d’une intervention militaire depuis le 30 juillet pour rétablir l’ordre constitutionnel.

Elle avait annoncé que le jour et les modalités de l’opération avaient été décidés, priorisant toutefois la voie diplomatique, mais reste désormais relativement silencieuse, bien que soutenue par plusieurs pays occidentaux.

Bras de fer

L’Union européenne a rappelé son « soutien à la position de la Cedeao », appelant une nouvelle fois « à la libération immédiate et inconditionnelle du président Bazoum et de sa famille », et « ne reconnaît pas les autorités issues du putsch », a affirmé à l’AFP Nabila Massrali, porte-parole du chef de la diplomatie de l’UE, Josep Borrell.

Des propos déclarés le lendemain d’une convocation de l’ambassadeur de l’UE à Niamey, Salvador Pinto da França, par le Premier ministre du Niger nommé par les militaires au pouvoir, Ali Mahaman Lamine Zeine.

La Cedeao est également soutenue par la France, engagée dans un bras de fer avec le régime militaire. Paris a suspendu début août la délivrance de visas à Niamey pour entrer sur son territoire. Paris refuse aussi le retour en France de son ambassadeur à Niamey, Sylvain Itté, « pris en otage » selon Emmanuel Macron, et dont l’expulsion a été ordonnée par les généraux au pouvoir fin août.

Le régime militaire se tourne notamment vers le Mali et le Burkina voisins, également dirigés par des militaires arrivés au pouvoir par un coup d’Etat, avec qui il a lancé samedi une coopération de défense, avec la création de l’Alliance des Etats du Sahel (AES).

 (Avec AFP)